Lugubre provocation… Plutôt que d’apaiser les tensions déjà très fortes à cause du massacre aléatoire et sans limite des requins à la Réunion, le sous-préfet, Olivier Tainturier, propose de commercialiser la viande de requins pour en faire « un produit de niche et un produit d’appel pour la clientèle touristique » (Journal télévisé du 16 février 2021, 12h30, sur Réunion la 1ère).
Le préfet, délégué à la perte de biodiversité
Le malheureux épisode cité illustre les propos tenus dans le programme “Droits de l’Océan” de LONGITUDE 181 : les préfets disposent de pouvoirs de dérogation à tout sujet, même quand ceux-ci vont au-delà des prérogatives du domaine régalien. Le préfet, sous couvert de sécurité et de maintien du développement économique, intervient à tout propos. On pourra écouter la série de podcasts consacrée en 2020 à cet abus potentiel qui, mois après mois, s’affirme dans le domaine de l’environnement ou de la biodiversité.
C’est le droit du vivant qui est en jeu
Au-delà de la dépense publique pour réaliser cette absurdité, c’est le droit du vivant, du bien commun, de l’animal sauvage qui est en jeu, et donc l’ouverture politique à une destruction choisie de notre environnement.
Quid des accords internationaux signés ? Quid de la prise en compte des avis scientifiques ? Quid de la situation des requins ? Pêchés à outrance dans toutes les mers du monde, à raison de 60 à 100 millions de requins par an ces 20 dernières années, ces animaux doivent-ils être sacrifiés pour le loisir ? Et maintenant, pour le business ?
Le sauvage : un produit de consommation ? Vraiment ?
A la Réunion on apprend de la bouche du sous-préfet qu’une étude a été lancée, en partenariat avec une Société d’Économie Mixte, l’agence NEXA, pour ni plus, ni moins, créer un produit commercial : la viande de requin ! Avec déjà un plan marketing “pour que la viande de requin soit un produit d’appel pour les touristes”.
Avec ce nouveau débouché économique vanté comme produit d’appel (va-t-on aussi inviter les touristes asiatiques à consommer les ailerons ?), on presse le rythme pour transformer la pêche de requin en une nouvelle pêche de loisir. Le requin, animal sauvage, devient “produit” commercial, oubliant que l’on parle du vivant, et que toute espèce a le droit d’exister. Le vivant n’a pas pour unique fonction de satisfaire nos caprices. On assiste à une réfutation du droit à la vie !
La transformation de viande de requin, qu’on prévoit de vendre “après fumaison”, doit-elle être le souci du sous-préfet ? N’est-ce pas plutôt la mise en œuvre d’actions de long terme pour garantir la vie en harmonie et en équilibre avec toutes les formes de vie ? Et non la satisfaction immédiate de zone de loisirs maritimes qu’on imagine rendre étanches à l’Océan ?
La France, seule au monde…
Rappelons que les requins bouledogue de la Réunion sont les seuls qui soient sujets à destruction ciblée, alors que ailleurs, au Mexique par exemple, la cohabitation avec ces mêmes requins ne pose aucun problème. Pour s’en convaincre, on pourra regarder le film ” Au nom du Requin “, co-produit par Longitude 181. Le film a donné lieu à la série éponyme de podcasts que l’on peut écouter, avec les interventions de Steven Surina, Eric Clua, et François Sarano.
La France, seul pays dont les raisons politiques du “à tout prix” et du “en même temps” conduisent à nier la biodiversité la plus élémentaire.
Daniel KRUPKA
Vice-président Longitude 181 et responsable du programme “Droits de l’Océan”